Chute un dimanche

Je venais de faire un beau feu dans le poele histoire de mettre de l’ambiance. Le temps est à l’humide, je me suis dit « je vais rentrer le linge qui ne sèchera pas sur la terrasse ( couverte) en bois. je vais le rentrer près du poele ».

je n’étais plus de méchante humeur, les choses s’organisaient pour ce dimanche gris mais on en ferait bien quelque chose. Il y a une petite marche pour aller sur la terrasse et j’y avais posé un piège : un tapis mouillé. Je regardais au loin et j’ai glissé sans rien voir venir, ça c’est sûr.

Bon Dieu que j’aime ces moments de merde où tout bascule ! Vlam, j’ai entendu mon crâne, côté tempe gauche craquer sur le plancher de cette belle terrasse. Puis la joue a flappi dur et lent, une bonne baffe, puis tout mon poids sur le flanc gauche et en son sein, que j’ai large et généreux et heureusement car sinon c’était les côtes qui morflaient tout.

Je n’ai rien compris et puis j’ai pensé à plein de choses. Les chocs physiques, je connais peu, les involontaires, je veux dire. Dans ces cas là je m’en prends plein la gueule, moralement, je veux dire.

Le coup du crâne sur le sol m’a inquiété alors j’ai roulé tendrement sur le dos. J’ai enlevé cette putain de barrette dans les cheveux. Et j’ai massé ma tête lentement en commencant à gémir. Je n’ai plus bougé, constatant que rien ne me heurtait terriblement, tout avait l’air en place. Je tenais déjà mon flanc gauche, je ne l’ai plus lâché ensuite. L’impression d’avoir un sein en boulet de canon que mon dos ne porterait plus sans aide manuelle.

Je suis restée sur le dos au sol. Il était là haut, il y avait la radio, je pouvais crier ou pleurer Madeleine, je resterai seule pour le moment. Je m’en suis donc donnée à plein. Les chocs physiques déclenchent chez moi un flot de lâcher de chagrins de toutes les couleurs. En général, ça me donne une idée de mon état mental, plus, moins, terriblement atteint ?

J’ai profité du moment pleinement. Je voyais les arbres jolis et j’entendais la pluie. La vie, j’ai pensé, comme c’est doux ce qu’il reste. Tu es coincée sur le dos dehors, la pluie fait du bruit, tu n’as pas froid. La tête entre les mains j’ai pleuré toute ma connerie. J’ai sangloté et gémi, je n’ai aucune honte à le dire. J’ai pensé aux morts, à ce qu’ils ressentent quand ils partent. Voient-ils le ciel comme celui là ? Entendent-ils la pluie ? J’ai pensé aux minutes où la vie bascule, à toutes les minutes où l’on est perdu à soi même. J’ai laissé les poches de désarroi s’ouvrir et se répandre dans ma gorge, elles dévalaient et faisaient des gammes.

Ensuite, il y a un ensuite. S’assoir et ne pas tomber dans les popommes. Se rendre compte que tout est en place sauf le boulet côté gauche. Sangloter et tout le reste, arriver dans l’escalier et appeler. Puis le lit et le chat qui vient tout contre. Puis le reste, et ne plus pouvoir sortir du fauteuil alors rester bien droite et même aller se laver tout à l’heure puisque tout va bien. Juste un clin d’oeil et un déversement d’eau saline. Et un beau prétexte pour ne pas passer l’aspirateur en ce dimanche moite et lent.

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5 réflexions sur “Chute un dimanche

  1. Arnica, couette et plein de tendresse. Demain, tu seras de toutes les couleurs probablement 😉
    Pour ma part, j’ai encore le souvenir d’une méchante chute dans l’escalier ciré d’une amie. Quelle trouille, et un bleu de la taille d’une assiette.
    Gros bisous.

  2. pas de bleus j’avais de la crème ad hoc …? Et l’impossibilité de me pencher vers l’avant, rester droite et plier les genoux pour executer tout mouvement..c’est pas mal c’est ce qu’il faut. Une bonne petite leçon, donc…

  3. Et voilà comment j’ai tout arraché mon épaule droite fin décembre…Au lieu de laisser aller comme toi, j’avais voulu rattraper et CRAC.
    Un bain dans lequel tu glisses un efferalgan, un savon aux algues, une bonne tasse de thé, et tu seras dans du coton.
    Pour la tête, fais attention quand même, on ne voit pas ce qu’il y a dedans.
    Câlins sur les mains.

  4. Les chocs physiques permettent de lâcher le « trop plein » émotionnel. Ton texte raconte bien cela, ces instants où on bascule dans une sorte de « dramatisation ». Mais comme dit le jardinduvent, attention à la tête… Bises et bon rétablissement!

  5. Tout va bien, pour la tête, c’est fichu depuis longtemps ah ah ah !!
    Un bon moment de décompression, et émotionnelle comme tu dis. Dans ces cas là je me laisse complètement aller comme une enfant. je revis des bobos d’enfance où tu pleures tout ton saoul même si c’est rien au finish, mais c’est la peur, et le choc. Ce sont des moments importants pour moi.

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